À propos du vidéogiciel : Xenosaga : Episode III

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jeudi 9 septembre 2021

Xenosaga : Episode III (PS2)

J'ai envie de faire un beau texte pour ce jeu. Pas parce que je l'ai aimé de façon inconditionnelle mais parce qu'il m'a pendant un temps extrêmement enthousiasmé avant finalement de me décevoir assez cruellement. J'ai pris beaucoup de notes au cours de ma partie. Je diviserais mon expérience en trois étapes : la découverte enthousiaste, la passion et la profonde déception. J'ai vu ce jeu comme mon jeu de l'année 2011 et au final il atterrit avec trois étoiles. Quels sont les raisons de cette chute en plein vol ? Attaquons sans plus tarder cette critique, construite dans un ordre chronologique suivant l'évolution de mon appréciation en parallèle de ma progression dans le jeu.

Chapitre 1 à 4, le Xenosaga nouveau se dévoile : tout nouveau, tout beau

First impressions of Earth : les déplacements sont incroyablement agréables. Je me suis senti plus dans l'action que jamais auparavant dans la saga. Je mets ça au compte des caméras qui se retrouvent bien plus souvent à hauteur du personnage (alors qu'avant c'était du PAC-MAN, constamment en contre-plongée), pas de changement d'angle brutal qui nous font perdre la direction que l'on donne au personnage, des animations plus humaines, moins rigides, un contrôle beaucoup plus souple (on peut diriger son personnage dans beaucoup plus d'axes avec le joystick que dans le précédent épisode) et une vitesse accrue, plus crédible et qui me semble plus adaptée à la superficie des niveaux (dans le sens où avancer à deux à l'heure aurait été je pense hors sujet). J'ai été enchanté par le contrôle de l'héroïne et ce dès la première minute ; encore jamais dans la saga j'avais eu une sensation si proche de diriger pour de bon un être humain.

Deuxième point énorme, c'est le game design en terme narratif. Pour moi, Xenosaga III c'est le J-RPG au meilleur de sa forme pour ce qui est de raconter une histoire. Tout est réglé à la perfection de manière à ce que le jeu porte l'histoire. Il faut savoir que l'histoire de Xenosaga III est pleine de combats, d'exploration de lieux hostiles et de balades dans la ville. Ça tombe bien car les phases de jeu c'est justement de ça qu'elles sont faites, et elles nous le font vivre très bien.

Il y a un équilibre fort dans ce jeu entre ce qui passe par le non-interactif (cinématiques, dialogues sur écran fixe) et ce qui passe par le jouable. De telle manière que je me suis toujours senti dans l'histoire. Dans un autre jeu, par exemple Digital Devil Saga, l'exploration d'un lieu hostile peut prendre tellement de temps et demander tellement d'investissement que ça peut me décrocher de l'histoire ; dans ces cas-là je n'ai plus l'impression que le jeu me raconte une histoire mais que l'histoire n'est qu'un prétexte à jouer. Ce n'est pas le cas dans Xenosaga III parce que toutes les séquences jouables ne cessent jamais (à l'exception de passages de donjons un peu absurdes) de s'inscrire clairement dans le récit du jeu.

Je veux parler aussi de la présentation du jeu extrêmement soignée. J'ai trouvé les menus très clairs et ergonomiques et les scènes de dialogues à écran fixe n'ont jamais été aussi bien foutues, avec les lignes de textes écrites dans de grandes barres avec un fond plein et le visage du personnage qui s'affiche, dont l'expression change au fil de l'échange. Je mets dans ce paragraphe aussi la musique, et en soit je trouve ça un petit peu signe d'échec de la ranger dans la « présentation », mais il me coûte de lui donner plus d'importance. Je ne peux que dire qu'elle m'a été agréable, donnant un caractère assez noble au jeu (beaucoup de violons, pianos, assez reposante) mais jamais elle n'a vraiment dépassé le stade de la musique d'ambiance au sens assez réducteur du terme. Je dirais que la musique accompagne agréablement le jeu, tombe un peu dans le tire-larmes à l'occasion de certaines cinématiques, et que c'est déjà mieux que les musiques de l'épisode II qui m'avaient vraiment horripilé. Pas de césar pour la musique et son rôle donc, mais un accompagnement agréable tout au long du jeu et dans ses différents moments (explorations, combats, cinématiques et dialogues).

Les combats, contrairement à ceux du deuxième épisode, sont bien plus intelligents autant dans leur déroulement que dans leur préparation. Il y a en général moyen de bien jouer, c'est-à-dire d'avoir largement l'avantage sur les ennemis, les battre facilement, en exploitant les possibilités du système. C'est un système de combat qui m'a vraiment laissé une place, s'est montré clair, m'a donné à réfléchir, à passer du temps dans les menus (que ce soit de déverrouillage de capacité, d'équipement ou d'achat/vente), à m'investir pour aborder les affrontements de la meilleure des façons ; bref, m'a mis au premier plan des batailles (avec l'abstraction inhérente au genre du J-RPG bien sûr) et j'en suis très content. Je suis arrivé à débloquer toutes les compétences de mes personnages avant le boss de fin, en faisant des choix, notamment au niveau de l'argent. Je n'ai jamais eu à faire des combats répétitifs de façon à engranger des points d'expérience, ça ne s'est pas passé comme ça. J'ai du faire trois combats « extras » à la fin du jeu pour le plaisir de débloquer toutes les compétences de mes persos et c'est tout. Je garde un bon souvenir du système de combat de Xenosaga III, même si certains ennemis à la fin m'ont contrarié parce que je n'arrivais pas à trouver une tactique pour les vaincre efficacement (pour ceux qui connaissent, ce sont justement ceux qui lâchent les Sephirotic Cane, dont il faut rassembler 99 pour une quête annexe – que je n'ai pas considéré mener à bien).

Dernière chose avant de passer à la suite de mon expérience, à la passion que j'ai ressenti à la mi-jeu, le Hakox. Le Hakox est « le » mini-jeu de Xenosaga. Assumé par l'histoire (un personnage va y jouer à un moment pour s'y détendre), ne demandant pas assez d'investissement pour faire jurer le récit et présentant de bons cadeaux à la clé pour booster ses persos (on va dire qu'en s'adonnant à un jeu vidéo, en faisant travailler son esprit le personnage découvre de nouvelles forces en lui hein :), ben il m'a bien amusé. Régulièrement se débloquent de nouveaux mondes, ce qui empêche de s'arrêter dix heures pour tout finir. Ça se présente sous la forme d'un jeu de casse-tête, entre echochrome et kula world et j'ai bien aimé couper l'aventure à l'occasion du déblocage d'un nouveau monde et faire travailler mon esprit de manière à donner de meilleures chances à mes personnages dans les combats à venir.

Chapitres 5 à 7, Xenosaga m'accroche comme jamais

Il y a un gros rebondissement dans l'histoire, qui jusque là vivotait un petit peu. Il apparaît pour les personnages un enjeu de survie très sérieux (s'ils ne font rien, ils vont mourir et ça c'est sûr) et l'héroïne se retrouve confrontée à des choses proprement incroyables. Je n'ai rien envie de dévoiler dans ma critique spoiler-free, mais je peux dire que dans ce chapitre j'étais très accroché à l'histoire et j'adorais jouer à Xenosaga Episode III. C'est le moment où le jeu s'est montré le plus satisfaisant parce que l'histoire, déjà bien racontée par le game design, était passionnante. En se resserrant sur des enjeux humains, clairs, compréhensibles, le récit a pour moi atteint des sommets.

Chapitre 8 à 9 : Xenosaga retombe dans ses travers et me perd

Tout ce que je reprochais à Xenosaga Episode II au niveau de l'écriture se retrouve dans ces chapitres. Des enjeux que je n'ai plus compris, qui me dépassaient autant qu'ils dépassaient les personnages, des dialogues philosophiques de comptoir, avec des personnages qui passent leur temps à parler des « buts » d'une « existence », comme si « l'existence » d'un être avait un « but » (ça me semble bien triste), de la grosse guimauve bien épaisse et des bons sentiments, et puis surtout, surtout : un univers d'une complexité à se jeter tout nu dans le Rhône un matin d'hiver. Si pour vous le concept de se plonger dans le subconscient d'une personne pour y réveiller la conscience enfouie d'une autre personne a un quelconque sens, alors peut-être, peut-être entendrez-vous une bribe des événements de Xenosaga dans sa dernière partie. Sinon, comme moi vous serez plus ou moins largués par un récit accumulant les rebondissements tout simplement inintelligibles, la faute à un univers démesurément complexe et extrêmement mal expliqué dans le scénario. Heureusement que les personnages de l'histoire aiment s'agresser les uns les autres, ça permet de resserrer les enjeux sur du « taper méchant », limité mais rassurant dans une telle ambiance de mind-fuck.

Attention paragraphe SPOILER.

Les gentils comme le méchant veulent sauver l'univers, mais de quoi ? Eux seuls le savent. Ils se fightent. Les gentils ne veulent pas laisser le méchant sauver l'univers à sa manière, même s'ils n'y bitent rien du tout. Notez qu'ils ne savent pas comment s'y prendre eux-mêmes, pour sauver l'univers, mais ils sont quand même bien décidés. Puis le méchant n'a qu'à pas être méchant d'abord.

Fin du paragraphe SPOILER.

Reste le plaisir simple, mais nié par les précédents épisodes, de voir une histoire « à peu près » menée à son terme. Toutes les choses frustrantes auxquelles on ne comprenait rien dans les précédents épisodes (et qui n'avaient aucune implication directe dans les récits) occupent ici une place primordiale. Là où les deux précédents épisodes semblaient comme des amuse-gueule avant d'attaquer le vrai sujet, LA grande conspiration, Xenosaga Episode III arrête son slalom et va au bout de ce que la série a lancé. L'histoire n'est cependant pas terminée à la fin, si bien que j'attendais un chapitre supplémentaire quand j'ai été surpris par le générique. Mais on va dire que l'histoire de complot avec laquelle on nous aguiche depuis le premier épisode est enfin traitée et conclue d'une certaine manière (no spoil).

Si j'avais un reproche à faire à la saga dans son ensemble, en dehors des reproches particuliers à chaque épisode, c'est de ne pas avoir raconté une histoire véritablement feuilletonesque entre les trois jeux. J'ai fait les trois jeux, et je suis incapable de dire quels sont les conséquences dans le troisième épisode de ce qui s'est passé dans les deux premiers. J'ai pas l'impression qu'il y ait quoi que ce soit qui s'est suivi entre les trois épisodes, à part cette conspiration dont on ne voyait que des scènes nébuleuses dans les deux premiers et qui arrive (tardivement) sur le devant de la scène dans Xeno III. Je trouve ça bien dommage.

Verdict = vaut le coup !