A l’époque de sa sortie je n’y ai pas joué. Ce reboot du dragon violet était très suspect, rien que par son look qui remplaçait le mignon petit dragon de Insomniac Games époque Playstation par une sorte de vilain garnement vindicatif. Puis les années passèrent, et j’ai acheté l’épisode Playstation 3 La Naissance d’un Dragon pour y jouer en coop local. L’expérience a été concluante et j’ai découvert que ce jeu n’était autre que l’épisode final d’une trilogie initiée sur Playstation 2 avec… A New Beginning. Me voilà donc à commander ce dernier sur Amazon.co.uk.
Je l’ai terminé et même si ça n’avait rien de génial, c’était très rafraîchissant de jouer à un titre où quand on passe une salle on a gagné, et à 100 %, pas à 5 % parce qu’on n’a pas rempli toutes les conditions des milliards de défis / trophées / objectifs annexes qui nous mettent dans une position d’échec perpétuel avec toutes ces jauges de complétion vides ou à moitié remplies. C’est rassurant, apaisant, de (re)jouer enfin à un jeu qui ne nous demande pas plus que l’évident par rapport à ce qu’on a devant les yeux, à l’histoire ou au level design.
En fait pour moi « histoire » et « level design » sont équivalents parce que l’histoire c’est le level design et le level design constitue l’histoire. Je veux dire, une salle avec telle architecture et tels ennemis qui apparaissent dans tel ordre, c’est du level design littéralement et ça constitue aussi un chapitre de l’histoire du jeu.
Le jeu souffre du syndrome des suites Playstation 2 de jeux de plate-formes Playstation, à savoir une diminution radicale de la surface de jeu au profit d’un aspect graphique plus fin mais pas pour autant vraiment impressionnant. Ape Escape 2 fut pour moi une grande déception de ce point de vue, et Spyro est du même acabit : les grandes zones ouvertes de la Playstation laissent place à des couloirs étriqués assez abstraits au rendu visuel bénéficiant « seulement » d’une résolution supérieure.
En vérité Spyro tire quand même son épingle du jeu du boost technologique dans ses animations, notamment faciales. Spyro est très expressif, il est tout mignon quand il marche et bat des ailes et son corps est modélisé très finement. Le rendu de la créature, relativement dessin animé, est très convaincant même en 2015. Il n’a pas vieilli pour un sou et son contrôle se permet même quelques finesses, comme la possibilité d’arrêter de planer vers l’avant pour juste se laisse tomber doucement en battant des ailes pour ne pas se faire mal à l’atterrissage.
Cette évolution technologique Playstation 2 qui a sacrifié la surface du terrain de jeu au profit de la résolution, je l’ai ressenti aussi dans le fameux Final Fantasy X et la disparition de la « carte du monde », cette représentation 3D de la planète qui nous faisait randonner de ville en ville en traversant des plaines et des rivières à une échelle fausse mais grisante (le personnage était à peine moins gros que les villes) pour le sentiment de voyage. J’ai souvent pensé que les développeurs se devaient d’en mettre plein les yeux et qu’une carte du monde vraiment plus belle que sur Playstation n’était pas encore faisable, même avec la nouvelle technologie ; alors, pour préserver un rendu visuel supérieur, ils ont simplement abandonné le concept de carte du monde.
La série des Tales of, à moindre budget que les Final Fantasy, a continué de faire des cartes du monde au rendu particulièrement médiocre (peut-être pire que les FF sur Playstation) mais qui ne dépareillait pas trop avec le rendu visuel des villes et des donjons.
J’en reviens à Spyro. La première bonne surprise c’est que le look de vilain garnement qui s’affiche sur la jaquette disparaît tout à fait dès que l’on commence l’histoire ! On suit Spyro depuis sa naissance jusqu’à ses 13-14 ans et il n’est absolument pas comme le laisse entendre la jaquette. C’est bel et bien le Spyro tout mignon, tout gentil que l’on connaît. La cinématique d’introduction, avec sa musique féerique à la Danny Elfman, arrive bien à poser le conte et se montre même touchante. Spyro est élevé par des libellules et ne se rend même pas compte qu’il est un dragon ! Jusqu’au jour où… Et là une quête commence pour sauver le monde, qui débute par l’adieu aux parents.
Si le reste de l’aventure se déroule de façon très linéaire, le scénario reste très présent tout le long du jeu à travers les dialogues entre Spyro et Sparx, son frère libellule. On n’oublie jamais qu’on est dans une histoire grâce à cela : on ne se retrouve jamais lâché à manger des salles d’ennemis au kilomètre (ce que l’on fait) sans cinématique avec personnage secondaire ou intervention de la libellule. La quête est très basique : sauver le grand dragon de chaque élément pour débloquer les pouvoirs de Spyro et aller botter les fesses du grand méchant qui menace le monde.
Ça c’est le script, mais quand on joue ce n’est pas plus fameux : on enchaîne des salles assez abstraites remplies d’ennemis à tabasser. Car oui, le combat est le centre du jeu, plus la plate-forme comme avant. Finies les rampes accélératrices sur lesquelles on chargeait pour gagner de la vitesse et ainsi atteindre en planant cette île volante au loin. Si Spyro peut toujours charger, cette compétence n’est jamais utile. Si Spyro peut toujours sauter et planer, ce sera rarement l’objet principal du challenge.
On passe son temps à se battre, et pour ça on peut taper et faire un combo, envoyer l’ennemi en l’air puis sauter pour l’enchaîner, et enfin utiliser 4 pouvoirs (feu, glace, éclair, terre) avec chacun une version souffle et une version tir. On débloque les 4 au cours de la quête et c’est surtout ça qui nous en fait changer : une fois débloquée la terre, on n’utilise plus jamais les autres parce que c’est le plus puissant. Quand on a l’éclair, on utilise sa version tir parce qu’elle immobilise les ennemis en l’air en leur faisant mal. Le choix est toujours évident malheureusement, ce qui abêtit les combats.
La difficulté est faible avec ces pouvoirs, mais ce qui rend le jeu à la fois très simple et pas barbant c’est le fait que quand on meurt, on revit indéfiniment sans perdre la progression dans les ennemis tués. Tout au plus ceux qu’on a commencé à blesser ont retrouvé leur barre de vie, comme nous. Bizarrement ça ne crée pas un sentiment de non-challenge complet, sans doute parce qu’il faut quand même se battre pour vaincre les ennemis, bien agressifs, résistants et qui ne se laissent pas faire.
Je ne vais pas louer le fait que le jeu nie la mort du personnage, pour moi c’est absurde. Ça fait un jeu qui n’est ni frustrant ni barbant, mais c’est au prix de la tension, du bon sens et de la vraisemblance. Pour ce jeu léger aux ambitions narratives somme toutes limitées (et presque inversement proportionnelles aux moyens investis dans le dispositif cinématographique : cinématiques nombreuses, animations faciales, stars du cinéma au doublage – Elijah Wood, Gary Oldman) c’était sans doute le mieux à faire : devoir se retaper des salles entières aurait été insupportable.
A New Beginning était une récréation sympa pour moi et une bouffée d’air frais entre les AAA profondément frustrants de la génération Playstation 3. C’est un jeu qui n’attise pas la haine mais ne brille pas non plus vraiment, surtout du fait de son énorme manque d’ambition dans son récit : le jeu n’est finalement qu’un grand couloir ponctué de salles avec des vagues d’ennemis à terrasser. Toujours beaucoup mieux qu’un F.E.A.R. 3 ceci dit !
Verdict = ok