À propos du vidéogiciel : Secret Files : Tunguska

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jeudi 9 septembre 2021

Secret Files : Tunguska (PC)

Nina à la recherche de son père disparu

Ce jeu ne va pas me laisser un souvenir impérissable. Je me sens de l'affection pour le genre de l'aventure PC pointer-cliquer mais jusqu'ici je ne peux pas dire qu'aucun titre m'ait convaincu. The Longest Journey m'a beaucoup déçu par rapport à sa réputation, Nostradamus était anecdotique et ce premier épisode de Secret Files, Tunguska (avant Puritas Cordis), j'ai eu bien du mal à le prendre au sérieux. Avec le recul l'aventure qui a eu le plus d'ampleur parmi ces jeux c'était The Longest Journey et pourtant je lui ai trouvé nombre de défauts rédhibitoires. J'ai plusieurs reproches à faire à Tunguska et je vais prendre quelques paragraphes pour développer chacun d'entre eux.

Des infographistes hors de contrôle.

D'abord, sur cette production, il semble que la bride des infographistes ait été très vite lâché et de fait, ils sont passés en mode sauvage. Le résultat c'est que les écrans du jeu (en bonne 2d) n'ont pas du tout été composés pour rendre les objets interactifs lisibles. Les pompiers game designers, chargés de sauver les bureaux du projet de l'incendie, ont rajouté un système d'aide rendant la recherche visuelle dans le décor caduque : en un clic sur la loupe en bas à droite, une loupe s'affiche sur toutes les zones cliquables à l'écran.

Quand j'ai allumé le jeu pour la première fois, j'ai vu cette option dans le menu avec la possibilité de la désactiver (ou de l'activer, je sais plus) ; je l'ai désactivé. Je n'avais pas envie qu'une partie du challenge du jeu, une partie de ce que le jeu me fait partager de ce que vit l'héroïne, me soit enlevé. Plein de bonnes intentions je me suis néanmoins vite retrouvé bloqué, j'ai activé l'option et découvert des objets très petits à l'écran sur lesquels je n'aurais jamais pensé cliquer. Déjà ils sont minuscules, mais en plus ils ne ressortent pas du tout à l'image.

En guise d'exemple vous pouvez regarder la première et la deuxième capture d'écran, et concentrer votre regard sur la loupe au milieu de l'écran, dans la deuxième image. De retour sur la première, cette loupe était en fait sur le petit amas de pixels noirs censés représenter un baladeur. A moins de faire glisser ma souris sur chaque pixel de l'écran, je ne vois pas comment j'aurais pu trouver. C'est un errement connu du genre, puisque les anglophones appellent ça du pixel hunting, de la chasse au pixel.

Des épreuves défiant le bon sens.

Un autre écueil du jeu pour moi, c'est le caractère illogique des énigmes. Je me suis retrouvé très souvent à tester tous les objets de mon inventaire sur toutes les zones interactives du décor, ainsi que sur eux-même pour les combinaisons. Quand tu sais que le jeu peut te demander de combiner une canne à pêche et un briquet vide en guise d'appât, tu perds confiance en ta capacité de résoudre les énigmes par déduction. Je précise que ce n'est pas la combinaison de cet exemple qui m'a dégoûté des énigmes du jeu étant donné que celle-ci arrive vers la fin, mais c'est la seule dont j'ai pris note.

De l'immaturité du projet narratif.

Le jeu ne se décide jamais vraiment entre le second degré, l'humour et le vrai thriller intense. Il y a des éléments des deux mais les deux s'annulent en fait. Toute tension dramatique est annihilé par le côté décalé des dialogues et des situations (notamment les énigmes) tandis qu'on ne peut pas rire à gorge déployée dans le contexte d'une aventure "sérieuse" dans le synopsis, on parle d'enlèvement du père de l'héroïne, de menaces de mort, de conspiration mondiale… Le mystère du jeu autour de la catastrophe de Tunguska est d'ailleurs relativement touffu, de loin on pourrait croire à une vraie enquête. Mais non. Parce que le jeu ne choisit jamais entre l'un et l'autre des deux tons, comme un projet sans direction. Et c'est malheureusement un reproche que j'ai fait à quelques jeux du genre, Les Chevaliers de Baphomet, The Longest Journey… Il y a une immaturité là-dedans, un manque d'ambition. Ils n'osent pas aller à fond dans le thriller et faire un bon thriller qui te cloue au siège, ou aller à fond dans la comédie et que tu sois constamment mort de rire. Peut-être qu'ils en sont incapables, mais à ce moment-là il faut qu'ils se donnent les moyens et mettent de vrais écrivains dans les dirigeants du projet. Je trouve tout ça assez consternant.

L'histoire d'amour, elle fait vraiment pitié. Max, à peine après avoir vu l'héroïne il est amoureux d'elle. Pourquoi ? Et ça passe comme une lettre à la Poste, sans qu'on nous dise ce que Nina peut bien représenter pour lui pour qu'il fasse montre de tels sentiments aussi vite. Mais ce ne sera pas traité, on restera à la surface du personnage de Max. D'ailleurs, ce n'est qu'un prémisse d'histoire d'amour, ça ne fait pas partie des enjeux du récit.

Des commentaires de Nina.

L'héroïne qui n'arrête pas de parler toute seule à haute voix, je n'y crois pas (voyant une caméra dans une salle avec une baignoire - en cliquant droit sur la caméra : "oh! je ne prendrais pas ma douche ici."). Les observations devraient se limiter à des trucs purement techniques que le graphisme ne peut pas montrer, du genre "la porte est bloquée". En l'état t'as l'impression que dès que tu cliques sur un truc tu demandes son avis à l'héroïne qui se met à raconter sa vie, des trucs complètement OSEF. Je remets même en question le fait que ces "observations" soient doublées, tellement il me paraît peu crédible qu'une personne dise constamment tout haut ce qu'elle pense sur TOUT.

D'une part c'est pas crédible que quelqu'un se balade et fasse des commentaires à haute voix sans arrêt. D'autre part elle pense trop à la place du joueur (pour la résolution d'énigme) et ressent trop à la place du joueur. Même si la plupart de ses commentaires ne nous renseigne pas sur son état émotionnel, ce ne devrait pas être à elle de nous en faire part oralement mais au jeu de nous le faire ressentir. Je parle de ses émotions et de ses sensations. Avec les monologues de l'héroïne le jeu échoue pas mal à nous mettre dans sa peau, pour les énigmes on va suivre ses indications (le jeu ne nous fait pas faire son cheminement intellectuel) et pour ce qu'elle ressent on va l'écouter, alors que ça pourrait passer par la musique (inexistante) ou tout simplement par ce qu'on doit faire dans le jeu. Las, les énigmes qui nous bloquent la route sont la plupart du temps hors-sujet de l'intrigue, rajoutées là artificiellement.

Enfin.

Quelques bons points tout de même. Le jeu est bien fait graphiquement, et la possibilité de sortir directement de l'écran où on est en double-cliquant sur la sortie nous évite d'assister à des déplacements qui seraient interminables et superflus lors des (nombreux) aller-retours. Toujours bon à prendre.

Conclusion.

Le bilan est donc assez mauvais. J'avais pris aussi le deuxième épisode sur Steam à l'époque, j'espère qu'il sera mieux mais dores et déjà un truc me réjouit c'est qu'il sera compatible écran large. J'ai en plus dû me faire Tunguska avec de grosses bandes noires sur les côtés de l'écran.

Verdict = dispensable