À propos du vidéogiciel : Mirror’s Edge

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jeudi 9 septembre 2021

Mirror's Edge (PS3)

C'est un des quelques jeux dont j'ai obtenu le trophée platine sur Playstation. J'ai accroché à la direction artistique et à la proposition du jeu ; courir tout seul (ou toute seule en l'occurrence) sur les toits d'une ville parfaite du futur. Parfaite car semblant s'accorder enfin à son environnement ; les gratte-ciels et les toits d'un blanc immaculé mettent en valeur le ciel d'un bleu pur, et vice-versa. Dans le futur de Mirror's Edge on a réglé les problèmes de pollution. L'urbanisme s'accorde à la nature. On nous parle d'une société totalitaire, mais l'héroïne que l'on incarne, elle, est libre. Elle est l'allégorie de la liberté physique, fuyant la police, fuyant le temps qui passe, fuyant sa solitude, fuyant la mort… dans une ville aux airs de paradis.

C'est donc une esthétique qui m'évoque beaucoup de choses, qui me parle énormément. La musique est, au moins en partie, au diapason. Au moins le thème du menu et celui qui s'appelle « the shard (puzzle) » délivrent une émotion brute. Toute la bande-son n'est pas dans ce goût-là, avec beaucoup de musiques oubliables, mais ces deux-là, avec sans doute la chanson « still alive » de Lisa Miskovsky, ont donné à Mirror's Edge une identité sonore unique.

Je ne suis pas loin de penser que d'un pur point de vue général « artistique », Mirror's Edge est la nouvelle licence la plus marquante et la plus forte de l'ère PS360.

En terme de jeu c'est unique aussi, mais moins abouti. Le mode histoire est rarement convaincant, la faute à un scénario proprement merdique (désolé) et une progression peu intéressante, bourrine, avec des fuites d'ennemis contre lesquels on fait un peu n'importe quoi. Le passage le plus intéressant ludiquement c'est celui où l'on doit atteindre le sommet d'une tour en construction, pour arrêter un assassin sniper. Le morceau « kate (puzzle) » installe une tension douce mais bien là, présente, et il s'agit d'observation du décor, de trouver le moyen d'atteindre telle plate-forme au-dessus, puis enfin de faire les acrobaties techniques nécessaires, avec le risque de retomber tout en bas. C'est le système de jeu de Mirror's Edge exploité à la hauteur de son potentiel : de l'exploration 3D plate-formesque exigeante, posée, technique.

Heureusement le système n'est pas seulement bon à cela, il est bon aussi pour la course et les contre-la-montre. C'est là que se trouve la vraie grosse proposition ludique du titre, avec d'abord un mode contre-la-montre pour le scénario (chaque chapitre devant être terminé sous un temps-cible) et surtout un mode épreuve, avec plusieurs dizaines de parcours chronométrés, sans ennemis, qu'il faut compléter en un temps record pour obtenir jusqu'à trois étoiles et se comparer à ses amis et aux joueurs du monde entier.

Avoir trois étoiles dans chaque parcours est extrêmement difficile. Non seulement car il faut trouver le trajet le plus court possible (et Dieu sait que le level design ne le rend pas évident) et aussi car il faut l'exécuter à la perfection au poil de nez près (ne pas rater un seul saut, voire même optimiser ses enjambements d'obstacles de façon à ce que l'héroïne perde le moins de vitesse possible, voire accélère). Cela constitue un challenge absolument remarquable, gratifiant, mais aussi frustrant je dois dire.

Pour les trajets, cela m'a paru souvent très, très compliqué d'en trouver un bon, et je m'en suis remis à la fonction "fantôme" qui permet de courir contre le fantôme d'un joueur sélectionné dans la liste des joueurs du monde entier (tant qu'à faire, prenons le fantôme du champion du monde), voire carrément à des vidéos Youtube pour voir par où passent les pros. Cela veut dire que je me suis senti vraiment perdu dans le level design, pas assez bon moi-même pour l'exploiter comme il se doit. Cela fait longtemps que j'ai fait le jeu, mais pour comparer à Catalyst (la suite sur PS4) que je fais en ce moment, je me sens bien plus capable de trouver des raccourcis et optimiser mes tracés.

Pour l'exécution des tracés, mon Dieu. Autant j'adore le principe de Mirror's Edge, autant j'ai bien souvent ragé de ne pas voir ce que faisaient mes pieds. Sauter sur un mur et ne pas voir clairement si je cours dessus ou si je saute devant à pieds joints comme un demeuré, cela m'a parfois beaucoup énervé. Et quand je voyais les fantômes des champions faire certains sauts, je n'en croyais pas mes yeux. « On peut vraiment faire ça? C'est quoi ce saut de la triche? » Encore une fois, est-ce que j'étais mauvais ? Pas forcément, je pense que le jeu manquait de lisibilité quant aux mouvements de l'héroïne à chaque instant. Je pense que le jeu aurait pu marquer la « connexion » au mur lors d'une course murale ou verticale de manière beaucoup plus claire, avec un changement d'angle de la caméra plus marqué, des bruits de pas plus forts, des animations des bras caractéristiques… En l'état, j'ai souvent eu la douloureuse et frustrante sensation de flotter alors que je m'acharnais sur les boutons. De fait je crois que Mirror's Edge (premier du nom, car sa suite a amélioré les choses) souffre d'un manque de retours au joueur sur l'état de l'héroïne à chaque instant. Pour un challenge aussi pointu que celui proposé par Mirror's Edge dans ses parcours chronos, cela peut vite faire très, très mal de ne pas maîtriser son personnage comme il se doit (même si évidemment, les vidéos les plus impressionnantes que l'on trouve sur la toile montre que c'est possible - mais cela me semble trop peu évident pour être agréable).

Ceci dit j’ai bel et bien fini par avoir trois étoiles dans une majorité de parcours. Mais c’était très dur et parfois agaçant…

Le game design concocté par DICE est très riche car il semble il y avoir de nombreuses façons de se hisser ou d’enjamber n’importe quel obstacle ; certaines coupent Faith dans son élan quand d’autres augmentent encore sa vitesse ! Et le jeu reste mystérieux sur ces différentes animations. Cela donne un côté magique quand on arrive une fois sur dix à se hisser sur une plate-forme sans que Faith fasse apparemment le moindre effort, se baisse juste un peu pour accélérer de plus belle.

Reste que j’ai été vraiment sensible à la philosophie du titre (cet objectif de surpasser ses possibilités physiques pour « libérer » son déplacement dans l’espace), son esthétique, son ambiance musicale et les quelques séquences marquantes de son mode histoire, toutes s’appuyant sur une bande-son puissante qui donne une âme à l’héroïne (l’intro où Faith regarde le vide avec le logo du titre qui apparaît, j’étais déjà conquis ; l’ascension de la tour pour sauver la sœur ; le dernier niveau et son infiltration nocturne portée par une musique magnifique).

Verdict = vaut le coup !