Voyage au Cœur de la Lune (PC)
Par Pierre Compignie le dimanche 16 février 2025, 11:30 - Critiques toute neuves
Développé par : KHEOPS STUDIO (France)
Sorti à l’origine en : août 2005 (États-Unis, version PC)
Comment j’ai pratiqué : Terminé en 22h sur PC Windows 7 avec la souris. 60 images par secondes. Version 1.04. Textes et voix en Français, sans sous-titres (désactivés).
Bidouilles diverses : Aucune.
Laissez votre imagination s’envoler dans une aventure épique inspirée du célèbre roman de Jules Verne “De la Terre à la Lune”. Voyage au Coeur de la Lune vous emmène au-delà de votre imagination, dans une dimension jonchée d’expériences nouvelles et extraordinaires. Vivez le rêve de voyager vers la Lune avec trois scientifiques décidés à explorer ces terres lointaines et inconnues. Un ancien temple, des ruines mystérieuses, une étrange civilisation souterraine et bien plus vous attendent dans cette odyssée interstellaire !
● Un monde à explorer.
● Des casse-tête complexes.
● Des graphismes impressionnants.[1]
Voyage au Cœur de la Lune, disons VCL, est un vidéogiciel d’aventure en pointer-cliquer réalisée par le studio parisien KHEOPS qui livre moins d’un an après leur précédent opus Retour sur l’Île Mystérieuse, le fruit de la continuation de leur (libre) adaptation de l’œuvre littéraire de Jules Verne.
Je suis déjà stupéfait par leur rapidité. À vue de nez en regardant le générique, ils sont une grosse vingtaine de personnes ? Ils avaient vraisemblablement réussi à mettre en place un processus efficace pour sortir des vidéogiciels de qualité à une cadence élevée. Je parle au plus-que-parfait car le studio a malheureusement mis la clef sous la porte en janvier 2012… Triste voire injuste.
VCL m’a particulièrement emballé car une grosse partie de ce qui m’avait frustré dans Retour sur l’Île Mystérieuse a disparu ! Avec le recul je dégage deux points particuliers qui m’avaient posé problème :
- la brutalité de la survenue de la fin sans crier gare, qui interrompt net mon investigation des mystères de l’île, dont je réalise alors, dépité, la nature facultative
- toutes ces interactions, ces actions, ces chemins… que l’on peut définitivement s’interdire en faisant ou ne faisant pas au bon moment telle autre action (exemple : si on découpe ou brûle les deux chemises, on ne peut plus fabriquer le cerf-volant et donc plus interagir avec le poteau électrique)
Le challenge interactif proposé par les développeurs dans VCL est très différent, tout en reprenant la même interface et un peu la même idée directrice d’autoriser plus d’une solution pour chaque problème.
Par exemple, le sel lunaire peut être obtenu de deux façons différentes, qui ne s’excluent pas mutuellement ; et c’est ce dernier point qui constitue à mon sens la vraie nouveauté de VCL par rapport à son prédécesseur.
VCL semble avoir à cœur de ne rien verrouiller, de, quoi que l’on fasse, laisser intacts et résolubles les différents problèmes, énigmes, mystères de son univers[2] ; je trouve cela incroyablement « juste », agréable et rassurant !
Car par ailleurs j’ai trouvé VCL difficile et finalement grisant par la marge de progression immense dont il m’a permis de faire l’expérience. En débarquant sur le cratère lunaire théâtre de notre aventure et en l’explorant une première fois, je suis resté sidéré face à la quantité d’énigmes potentielles dont je n’avais pas le début d’un semblant d’idée de méthode de résolution : un sélénite (habitant de la lune) s’exprimant dans une langue inconnue me bloquant le passage avec à ses pieds une flaque bleue (?), deux petites mares avec chacune un gros tuyau avec une poignée à trois positions et un clavier avec des touches marquées de symboles (??), une espèce d’orgue qui, en soufflant dedans, déclenchent une réponse sonore de la part de sélénites dont je ne sais même pas où il se trouvent (???)…
En résumé, j’ai commencé en ayant face à moi une montagne de mystères plus impénétrables les uns que les autres ; et j’ai terminé avec une connaissance encyclopédique du moindre petit mécanisme lunaire. Le travail intellectuel à accomplir est considérable et, me semble-t-il, jamais impossible ou trop laborieux – c’est pour ça que j’ai adoré VCL.
Même les problématiques de combinaison d’objets sont meilleures dans cet épisode. Je n’ai jamais eu à essayer tous les objets sur tous les objets pour me débloquer ! Pas que je ne l’ai jamais fait (car je suis resté bien bloqué à des moments), mais plutôt que cela n’a jamais été la solution ; simplement parce que les combinaisons que l’on doit réaliser ne sont pas improbables et/ou ne nécessitent pas de connaissance poussée dans tel ou tel domaine externe au VG.
J’ai aussi découvert une « règle » de l’interface qui était déjà valable dans Retour… sans que je m’en rende compte : parfois (toujours ?) l’icône d’interaction n’apparaît pas sur un élément du décor si l’on ne possède pas l’objet à utiliser avec celui-ci. Ça me l’a fait avec les nuages jaunes de chlore : aucune icône en les survolant avec le pointeur si je ne transportais pas un « globe étanche » dans mon inventaire. J’ai cependant toujours un doute sur ce système car je suis quasiment sûr d’avoir vu des icônes d’interaction avant de posséder les bons objets… À creuser.
Et la fin quant à elle ? Pas du tout brutale, heureusement ! À vrai dire une grande partie du challenge consiste à préparer minutieusement notre retour sur Terre et le VG (via le héros Michel Ardan) nous liste très précisément les tâches à accomplir pour cela. On maîtrise donc parfaitement non seulement notre avancée vers le dénouement, mais aussi son déclenchement, puisqu’il nous incombe de déclencher la mise à feu de l’obus. Tout le contraire de Retour… où c’était à nous de découvrir comment quitter l’île et où à peine réalisait-on que l’on avait trouvé une méthode viable que le générique défilait déjà sous nos yeux…
Je me suis trouvé coincé à deux reprises et les deux fois j’ai triché.
La première, c’était au tout début, il s’agissait d’une interaction que je ne trouvais pas. Vous verrez dans la galerie d’images. Je pense que j’aurais dû chercher plus longtemps et alors j’aurais trouvé.
La seconde, par contre, j’ai cherché vraiment longtemps (genre plusieurs heures). Je n’arrivais pas à déterminer comment « neutraliser » le sélénite dans le laboratoire, qui nous empêche de ramasser, entre autres, l’acide azotique. J’avais bien compris que je pouvais jouer avec sa nourriture, mais je ne trouvais pas quelle préparation ou objet verser dans le bac à nourriture de la cuisine pour aboutir à ce que le sélénite me laisse prendre les objets du labo. J’avais précisément listé les différents repas qui provoquaient l’ensemble des effets secondaires que j’avais découverts : ivresse, rapidité, vision verte, vision violette. L’ivresse du sélénite le rendait plus sympathique mais il restait intransigeant avec moi au sujet de lui piquer du matériel. Vision violette j’avais essayé (mon personnage portant un costume violet je me disais qu’il pourrait alors disparaître aux yeux du sélénite), sans succès. Rapidité, je voyais l’effet sur le sélénite près de la cuisine qui ne pouvait juste plus me parler, je me suis dit « non c’est pas ça ». Vision verte je ne sais plus si j’ai essayé ou non, sans doute que oui ?
La solution était… la rapidité. Le sélénite du labo, créature zêlée s’il en est, profite de sa célérité inopinée pour astiquer fébrilement ses machines… et nous tourne le dos ce faisant :(
Je juge cette issue improbable mais, en effet… pas impossible. Donc je n’en veux pas au VG. Je pense que j’ai manqué de méthode et d’ouverture d’esprit. Je n’aurais pas dû disqualifier cet effet secondaire au prétexte qu’il ne semblait pas affecter à mon avantage le sélénite proche de la cuisine. J’aurais dû aller au bout de ma tentative (et noter le résultat) avant de jeter l’éponge.
Pour la première, il s’agissait aussi d’une action impobable, mais cette fois-ci plus au sens physique du terme : je n’imaginais pas un élément du décor atteignable par le protagoniste car trop éloigné en apparence. J’en veux donc un peu plus au VG là-dessus, mais aussi à moi car j’aurais dû tout de même essayer avant de déclarer forfait.
Un point que je regrette toujours dans les productions KHEOPS, c’est l’écriture des personnages, de leurs dialogues, de leur parcours personnel et psychologique… On est toujours dans quelque chose d’assez peu adulte et complexe, avec que des émotions légères et positives. Le scénario manque d’enjeux, de sens, d’épaisseur : Ardan parle de repartir de la lune alors qu’il vient à peine de rencontrer les sélénites… Je ne trouve pas d’histoire forte dans les vidéogiciels de KHEOPS ; tout du moins au-delà du challenge interactif qui constitue certes une histoire passionnante que l’on vit en première ligne (tu débarques sur la lune, tu explores et tu te débrouilles), mais sans psychologie ni émotions.
Il y a un mystère que je n’ai pas élucidé : comment exploiter la lettre brûlée ? J’ai pu terminer le VG sans, car j’ai obtenu les informations qu’elle contient par un autre biais, en faisant parler le coq emmené avec lui par le héros (dialogue à la fois amusant et intéressant, qui souligne le peu de considération qu’ont les humains pour les animaux). J’ai regardé ensuite dans la soluce par curiosité : il fallait utiliser la lettre brûlée sur une flamme réglée au minimum, cela fait rougir le plomb contenu dans l’encre et donc l’écriture !
Enfin, je note que l’épilogue établit VCL comme un antépisode de Retour… puisqu’il voit Michel Ardan atterrir dans l’océan, échouer sur le rivage de… l’île mystérieuse et être accueilli par le Capitaine Némo encore vivant !
Très emballé par cette nouvelle proposition du studio KHEOPS qui a corrigé à peu près tout ce qui me dérangeait dans le challenge interactif de leur précédente production ! Voilà une épreuve de recherche, d'exploration, d'investigation et de réflexion super stimulante, qui nous submerge d'abord dans l'inconnu complet pour in fine nous faire sentir incroyablement intelligent. « Gratifiant » est le mot qui convient pour qualifier Voyage au Cœur de la Lune. Je plongerai avec plaisir dans les autres vidéogiciels du développeur !
Verdict =dispensable|ok| vaut le coup ! |énormissime
Note(s)
Galerie d’images
































Commentaires
Beau travail pour cette critique qui m’a bien parlé à un certain moment !