Voyage au Cœur de la Lune (PC)

Développé par : KHEOPS STUDIO (France)

Sorti à l’origine en : août 2005 (États-Unis, version PC)

Comment j’ai pratiqué : Terminé en 22h sur PC Windows 7 avec la souris. 60 images par secondes. Version 1.04. Textes et voix en Français, sans sous-titres (désactivés).

Bidouilles diverses : Aucune.

Laissez votre imagination s’envoler dans une aventure épique inspirée du célèbre roman de Jules Verne “De la Terre à la Lune”. Voyage au Coeur de la Lune vous emmène au-delà de votre imagination, dans une dimension jonchée d’expériences nouvelles et extraordinaires. Vivez le rêve de voyager vers la Lune avec trois scientifiques décidés à explorer ces terres lointaines et inconnues. Un ancien temple, des ruines mystérieuses, une étrange civilisation souterraine et bien plus vous attendent dans cette odyssée interstellaire !

● Un monde à explorer.
● Des casse-tête complexes.
● Des graphismes impressionnants.
[1]

Voyage au Cœur de la Lune, disons VCL, est un vidéogiciel d’aventure en pointer-cliquer réalisée par le studio parisien KHEOPS qui livre moins d’un an après leur précédent opus Retour sur l’Île Mystérieuse, le fruit de la continuation de leur (libre) adaptation de l’œuvre littéraire de Jules Verne.

Je suis déjà stupéfait par leur rapidité. À vue de nez en regardant le générique, ils sont une grosse vingtaine de personnes ? Ils avaient vraisemblablement réussi à mettre en place un processus efficace pour sortir des vidéogiciels de qualité à une cadence élevée. Je parle au plus-que-parfait car le studio a malheureusement mis la clef sous la porte en janvier 2012… Triste voire injuste.

VCL m’a particulièrement emballé car une grosse partie de ce qui m’avait frustré dans Retour sur l’Île Mystérieuse a disparu ! Avec le recul je dégage deux points particuliers qui m’avaient posé problème :

  • la brutalité de la survenue de la fin sans crier gare, qui interrompt net mon investigation des mystères de l’île, dont je réalise alors, dépité, la nature facultative
  • toutes ces interactions, ces actions, ces chemins… que l’on peut définitivement s’interdire en faisant ou ne faisant pas au bon moment telle autre action (exemple : si on découpe ou brûle les deux chemises, on ne peut plus fabriquer le cerf-volant et donc plus interagir avec le poteau électrique)

Le challenge interactif proposé par les développeurs dans VCL est très différent, tout en reprenant la même interface et un peu la même idée directrice d’autoriser plus d’une solution pour chaque problème.

Par exemple, le sel lunaire peut être obtenu de deux façons différentes, qui ne s’excluent pas mutuellement ; et c’est ce dernier point qui constitue à mon sens la vraie nouveauté de VCL par rapport à son prédécesseur.

VCL semble avoir à cœur de ne rien verrouiller, de, quoi que l’on fasse, laisser intacts et résolubles les différents problèmes, énigmes, mystères de son univers[2] ; je trouve cela incroyablement « juste », agréable et rassurant !

Car par ailleurs j’ai trouvé VCL difficile et finalement grisant par la marge de progression immense dont il m’a permis de faire l’expérience. En débarquant sur le cratère lunaire théâtre de notre aventure et en l’explorant une première fois, je suis resté sidéré face à la quantité d’énigmes potentielles dont je n’avais pas le début d’un semblant d’idée de méthode de résolution : un sélénite (habitant de la lune) s’exprimant dans une langue inconnue me bloquant le passage avec à ses pieds une flaque bleue (?), deux petites mares avec chacune un gros tuyau avec une poignée à trois positions et un clavier avec des touches marquées de symboles (??), une espèce d’orgue qui, en soufflant dedans, déclenchent une réponse sonore de la part de sélénites dont je ne sais même pas où il se trouvent (???)…

En résumé, j’ai commencé en ayant face à moi une montagne de mystères plus impénétrables les uns que les autres ; et j’ai terminé avec une connaissance encyclopédique du moindre petit mécanisme lunaire. Le travail intellectuel à accomplir est considérable et, me semble-t-il, jamais impossible ou trop laborieux – c’est pour ça que j’ai adoré VCL.

Même les problématiques de combinaison d’objets sont meilleures dans cet épisode. Je n’ai jamais eu à essayer tous les objets sur tous les objets pour me débloquer ! Pas que je ne l’ai jamais fait (car je suis resté bien bloqué à des moments), mais plutôt que cela n’a jamais été la solution ; simplement parce que les combinaisons que l’on doit réaliser ne sont pas improbables et/ou ne nécessitent pas de connaissance poussée dans tel ou tel domaine externe au VG.

J’ai aussi découvert une « règle » de l’interface qui était déjà valable dans Retour… sans que je m’en rende compte : parfois (toujours ?) l’icône d’interaction n’apparaît pas sur un élément du décor si l’on ne possède pas l’objet à utiliser avec celui-ci. Ça me l’a fait avec les nuages jaunes de chlore : aucune icône en les survolant avec le pointeur si je ne transportais pas un « globe étanche » dans mon inventaire. J’ai cependant toujours un doute sur ce système car je suis quasiment sûr d’avoir vu des icônes d’interaction avant de posséder les bons objets… À creuser.

Et la fin quant à elle ? Pas du tout brutale, heureusement ! À vrai dire une grande partie du challenge consiste à préparer minutieusement notre retour sur Terre et le VG (via le héros Michel Ardan) nous liste très précisément les tâches à accomplir pour cela. On maîtrise donc parfaitement non seulement notre avancée vers le dénouement, mais aussi son déclenchement, puisqu’il nous incombe de déclencher la mise à feu de l’obus. Tout le contraire de Retour… où c’était à nous de découvrir comment quitter l’île et où à peine réalisait-on que l’on avait trouvé une méthode viable que le générique défilait déjà sous nos yeux…

Je me suis trouvé coincé à deux reprises et les deux fois j’ai triché.

La première, c’était au tout début, il s’agissait d’une interaction que je ne trouvais pas. Vous verrez dans la galerie d’images. Je pense que j’aurais dû chercher plus longtemps et alors j’aurais trouvé.

La seconde, par contre, j’ai cherché vraiment longtemps (genre plusieurs heures). Je n’arrivais pas à déterminer comment « neutraliser » le sélénite dans le laboratoire, qui nous empêche de ramasser, entre autres, l’acide azotique. J’avais bien compris que je pouvais jouer avec sa nourriture, mais je ne trouvais pas quelle préparation ou objet verser dans le bac à nourriture de la cuisine pour aboutir à ce que le sélénite me laisse prendre les objets du labo. J’avais précisément listé les différents repas qui provoquaient l’ensemble des effets secondaires que j’avais découverts : ivresse, rapidité, vision verte, vision violette. L’ivresse du sélénite le rendait plus sympathique mais il restait intransigeant avec moi au sujet de lui piquer du matériel. Vision violette j’avais essayé (mon personnage portant un costume violet je me disais qu’il pourrait alors disparaître aux yeux du sélénite), sans succès. Rapidité, je voyais l’effet sur le sélénite près de la cuisine qui ne pouvait juste plus me parler, je me suis dit « non c’est pas ça ». Vision verte je ne sais plus si j’ai essayé ou non, sans doute que oui ?

La solution était… la rapidité. Le sélénite du labo, créature zêlée s’il en est, profite de sa célérité inopinée pour astiquer fébrilement ses machines… et nous tourne le dos ce faisant :(

Je juge cette issue improbable mais, en effet… pas impossible. Donc je n’en veux pas au VG. Je pense que j’ai manqué de méthode et d’ouverture d’esprit. Je n’aurais pas dû disqualifier cet effet secondaire au prétexte qu’il ne semblait pas affecter à mon avantage le sélénite proche de la cuisine. J’aurais dû aller au bout de ma tentative (et noter le résultat) avant de jeter l’éponge.

Pour la première, il s’agissait aussi d’une action impobable, mais cette fois-ci plus au sens physique du terme : je n’imaginais pas un élément du décor atteignable par le protagoniste car trop éloigné en apparence. J’en veux donc un peu plus au VG là-dessus, mais aussi à moi car j’aurais dû tout de même essayer avant de déclarer forfait.

Un point que je regrette toujours dans les productions KHEOPS, c’est l’écriture des personnages, de leurs dialogues, de leur parcours personnel et psychologique… On est toujours dans quelque chose d’assez peu adulte et complexe, avec que des émotions légères et positives. Le scénario manque d’enjeux, de sens, d’épaisseur : Ardan parle de repartir de la lune alors qu’il vient à peine de rencontrer les sélénites… Je ne trouve pas d’histoire forte dans les vidéogiciels de KHEOPS ; tout du moins au-delà du challenge interactif qui constitue certes une histoire passionnante que l’on vit en première ligne (tu débarques sur la lune, tu explores et tu te débrouilles), mais sans psychologie ni émotions.

Il y a un mystère que je n’ai pas élucidé : comment exploiter la lettre brûlée ? J’ai pu terminer le VG sans, car j’ai obtenu les informations qu’elle contient par un autre biais, en faisant parler le coq emmené avec lui par le héros (dialogue à la fois amusant et intéressant, qui souligne le peu de considération qu’ont les humains pour les animaux). J’ai regardé ensuite dans la soluce par curiosité : il fallait utiliser la lettre brûlée sur une flamme réglée au minimum, cela fait rougir le plomb contenu dans l’encre et donc l’écriture !

Enfin, je note que l’épilogue établit VCL comme un antépisode de Retour… puisqu’il voit Michel Ardan atterrir dans l’océan, échouer sur le rivage de… l’île mystérieuse et être accueilli par le Capitaine Némo encore vivant !

Très emballé par cette nouvelle proposition du studio KHEOPS qui a corrigé à peu près tout ce qui me dérangeait dans le challenge interactif de leur précédente production ! Voilà une épreuve de recherche, d'exploration, d'investigation et de réflexion super stimulante, qui nous submerge d'abord dans  l'inconnu complet pour in fine nous faire sentir incroyablement intelligent. « Gratifiant » est le mot qui convient pour qualifier Voyage au Cœur de la Lune. Je plongerai avec plaisir dans les autres vidéogiciels du développeur !
Verdict = dispensable | ok | vaut le coup ! | énormissime

 

Note(s)

  1. ^ Présentation du magasin Big Fish.
  2. ^ La seule exception : la lettre brûlée, que l’on peut définitivement perdre en la carbonisant. D’un autre côté, celle-ci n’est exploitée dans aucune autre énigme !

 

Galerie d’images

01a
Je vous montre avec quelques images ce sur quoi j’ai sévèrement bloqué au début de l’histoire : une interaction que je ne trouvais pas. D’abord je vous montre ici la vue en étant au centre de l’obus, sur son plancher…
01b
…là je me contente de lever la tête : on note qu’en haut de l’échelle en face de moi il y a une petite porte (pour sortir de l’obus) et un hublot tout en haut au plafond…
01c
…je me rapproche de l’échelle…
01d
…et je me contente de lever les yeux, pour vous montrer ce que je vois. Notons que la porte étanche n’est, à cette distance, pas interactive…
01e
…je grimpe à l’échelle et me retrouve le nez devant la porte étanche, qui maintenant est bel et bien interactive…
01f
…je me retourne un peu sur le côté pour qu’on réalise à quelle hauteur je me situe dans l’obus…
01g
…je me retourne encore un peu plus et lève les yeux : je vois le hublot du plafond…
01h
…et il se trouve qu’en déplaçant le curseur sur l’un de ses quatre boulons, on voit qu’ils sont interactifs… C’est ça qui m’a échappé et que j’ai finalement lu sur internet. Cela me paraît un peu « limite » en terme de vraisemblance que le personnage arrive à dévisser les boulons avec sa clef depuis le haut de l’échelle. Je pense que ce hublot me semblait trop haut, hors de portée, et que j’ai inconsciemment catégorisé comme impossible toute interaction avec. Je pense d’ailleurs que le hublot n’est pas moins loin de moi que ne l’était la porte étanche depuis le bas de l’échelle, et pourtant, elle, je ne pouvais pas interagir avec… Ce qui relève, m’est avis, d’un caractère arbitraire du design peu équitable de la part des développeurs.
02a
Rapidement le VG nous pose comme une sorte de mission secondaire, l’enjeu de découvrir la vérité sur ce qu’il est arrivé pendant que notre héros était évanoui dans l’obus et qui a abouti à la mort de nos deux compagnons de voyage. Un écran est dédié à cette enquête…
02b
…enquête qui devient indispensable à un stade avancé de l’aventure puisque le Grand Lunaire conditionne son aide à la résolution de cette énigme.
03
De nombreux objets sont disponibles en abondance, et l’interface nous interdit d’en porter plus que trois à la fois.
04
J’ai trouvé la direction artistique assez loufoque !
05
Les développeurs ont donné à Michel Ardan un visage assez atypique, avec des yeux volontiers globuleux et une moustache épaisse qui masque pas mal ses expressions. Impression au final de perso beaucoup moins sensible que Mina par exemple (qui ne l’était déjà pas de ouf).
06a
Florilège d’appareils mystérieux…
06b
…celui-ci est particulièrement chouette. Chaque forme géométrique représente en fait un nombre, à déterminer en comptant le nombre de côtés de chaque figure. Les lumères vertes signifient « + ». Ici, on nous pose en fait l’opération « 8 + 3 » et il faut donc cliquer sur la figure qui a 11 côtés !…
06c
…ici les petits dessins sous la tête m’ont permis de trouver la préparation culinaire donnant la vision violette, qui révèle alors le petit dessin blanc au milieu du crâne… dessin que l’on retrouve en super grand à la surface lunaire ! Et qui m’a fait comprendre que les deux symboles dans des cercles sont la solution de l’énigme des claviers étranges à côté des petites mares.
07
On retrouve les cinématiques à bas coût en vignettes fixes de bédé crayonnée, qui apportent une mise en scène externe et bienvenue de notre personnage.
08
Une vue d’ensemble de l’extérieur de la structure lunaire dans les entrailles de laquelle j’ai passé tant d’heures ! On note la présence de cinq petites forêts, chacune peuplée de plantes d’une couleur distincte. Il y a tout un système à comprendre à propos de ces plantes : certaines ont un pacte de non-agression (sont compatibles), d’autres ont un rapport dominant-dominé… Tout un petit univers à découvrir et à comprendre :)
09a
Le technicien du fameux laboratoire, au prénom qui en dit long sur son zèle…
09b
…je prépare la fameuse compote avec les fruits mephitia et strangulica (effet rapidité)…
09c
…je la verse dans la bac à nourriture des sélénites…
09d
…voici l’effet obtenu sur le sélénite près de la cuisine…
09e
…peu concluant ! Mais je n’aurais pas dû m’y arrêter, car…
09f
…notre ami Scrupul est maintenant tellement affairé qu’il nous tourne le dos !
10
Encore des inscriptions étranges à interpréter. Il y a tout un ensemble de symboles lunaires qu’il convient de décrypter (il y a un menu dédié où l’on suit la progression de notre « dictionnaire » improvisé, tandis que la traduction des symboles découverts apparaît lorsqu’on les survole avec le curseur).
11a
Ce sélénite fan de jeux d’esprit met au défi notre logique…
11b
11c
…alors, vous l’avez ?
12
Récupérer les objets du laboratoire ouvre énormément d’interactions. L’acide azotique alimente la machine permettant de communiquer avec la Terre, mais permet aussi de déboucher une conque de Belbaab afin de pouvoir comprendre le coq !
13a
Dont acte…
13b
…très juste :-/
14
À la fin, notre obus s’échoue sur un rivage bien connu. La couleur de ce décor me frappe toujours autant, elle est bien plus terne, bien moins « paradisiaque » que dans de nombreuses représentations d’îles du Pacifique. Plus réaliste très certainement ? J’aime beaucoup.

 

Commentaires

1. Le lundi 24 février 2025, 08:57 par Marie-Thérèse

Beau travail pour cette critique qui m’a bien parlé à un certain moment !

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