Last Stop (PS5)
Par Pierre Compignie le samedi 29 juillet 2023, 10:30 - Critiques toute neuves
Développé par : VARIABLE STATE (Angleterre)
Sorti à l'origine en : juillet 2021 (Europe, version PS5)
Comment j'ai pratiqué : Terminé en 6h02 en mode normal (1 sur 1), sur PS5 avec la manette Dual Sense Edge. 60 images par secondes. Version 1.000.001.
Un jeu vidéo qui traite de vies secrètes, de liens qui se créent et de la magie que l’on trouve dans la vie de tous les jours.
Last Stop est une aventure pour un joueur à la troisième personne, qui se déroule dans le Londres d’aujourd’hui.
Écrit et développé par Variable State, les créateurs du jeu primé Virginia, Last Stop raconte trois histoires interconnectées avec trois personnages principaux à incarner.
- Donna, une ado qui plane un peu et se sent prisonnière d’un milieu étouffant et d’une grande sœur qui la protège trop. Quand elle sort, Donna recherche les frissons de l’adolescence avec ses amis Becky et Vivek, mais elle trouve davantage que ce qu’elle attendait lorsque ce trio se transforme en kidnappeurs lors d’un jeu de détectives amateurs qui tourne mal.
- John, un père divorcé d’âge mûr et surmené. Accablé par les dettes et le stress de la monoparentalité, John jalouse en secret la vie facile et libre de son voisin célibataire de vingt ans, Jack. Quand ces deux-là deviennent victimes d’un inconnu vengeur, un objet ancien maudit menace de transformer leurs vies pour toujours.
- Meena, une professionnelle à l’ambition dévorante, qui se bat pour obtenir les mêmes satisfactions dans sa vie personnelle que celles que lui procure un emploi qui la passionne. Alors que Meena lutte pour obtenir une promotion cruciale contre une collègue arriviste, une chose ancienne semble prendre vie dans le sous-sol de son lieu de travail.
Last Stop inclut une bande originale du compositeur Lyndon Holland récompensé par la BAFTA, et exécutée par l’orchestre philharmonique de Prague.
Incarnez 3 personnages uniques. Faites des choix pour façonner leurs conversations. Entrez dans leurs vies et découvrez où vous mènera chacune de leurs histoires personnelles.[1]
Tellement de choses ne vont pas dans Last Stop...
Mon plus gros problème c'est que l'histoire m'a plus gêné qu'emballé. Côté Donna, on assiste ni plus ni moins à des ados séquestrant un type qu'ils ont assommé avec une barre de fer, et être totalement cool avec ça. Je pourrais aussi vous parler de comment je n'ai pas cru à leur besoin de le garder prisonnier, étant donné que des jeunes n'auraient aucun mal à raconter n'importe quel bobard appuyant un contexte de légitime défense qui les dédouanerait totalement, mais ce n'est même pas ce qui m'a le plus embêté. Non ce qui m'a embêté c'est que la séquestration d'un inconnu sur plusieurs jours n'a pas la moindre foutue conséquence dans l'histoire. Le réalisateur Larry Clark avait fait de l'absence d'empathie des jeunes le thème principal de son film Bully, choquant. Dans Last Stop, cette violence inconsciente des jeunes n'est simplement pas traitée, elle n'est pas un sujet. Moi je suis choqué d'assister à cela et que personne n'en parle ; pour moi le sujet qui s'imposait c'était ces trois jeunes qui se permettent de retenir quelqu'un contre son gré, sans même le nourrir ou l'hydrater, pendant plusieurs jours ! Mais les scénaristes préfèrent faire de la victime un être étrange aux superpouvoirs de plus en plus terrifiants qui vont prendre toute la place et évacuer complètement l'enjeu de la « psychopathie » des trois jeunes. D'ailleurs Donna semble par ailleurs parfaitement douée d'empathie avec sa famille, donc j'ai plus l'impression d'une maladresse des scénaristes qui ont écrit un enlèvement sans assumer toute sa signification psychologique pour ceux qui le commettent.
La construction de l'histoire de Donna m'a rendu perplexe : le dernier chapitre arrive de façon arbitraire. L'étranger (la fausse victime) décide simplement qu'il est temps de l'emmener dans son univers. Pourquoi au chapitre 6 plutôt qu'au chapitre 1 ? That's anyone's guess.
Côté John, on verse dans la comédie de changement de corps. Non seulement ça n'a rien d'inédit (voir l'épisode Zone 51 de la saison 6 des X-Files, par exemple) mais surtout ce n'est ni drôle, ni prenant, c'est juste convenu. En arrière-plan, je suis touché par le thème du corps qui vieillit et ne permet plus de courir sans risquer une crise cardiaque, mais une fois encore ce n'est pas le sujet central, c'est un à-côté d'une histoire perchée où il s'agit de retrouver le type étrange qui a jeté la malédiction... D'ailleurs, j'ai été très surpris que John, un père aimant et très responsable, prenne tous les risques pour sauver le type dans son corps, Jack – et notamment le risque de laisser sa petite fille orpheline. John est un héros, c'est cool, sauf que le scénariste l'a surtout construit au préalable comme un père responsable, et ses actions dans le dernier acte n'en sont pas dignes, ce sont plutôt celles d'un classique héros hollywoodien sans peur et sans reproche.
Côté Meena, difficile de ne pas la détester : elle trompe son mari, lui ment ouvertement, le voit malheureux et en colère et ne fait rien, ne met pas fin à leur relation (le seul truc sain à faire, de toute évidence). Pire, elle a un revirement à mi-parcours où soudainement elle trouve que ce n'est pas très très bien de faire ça tout de même, je me demandais d'où cela sortait ? Visiblement ça ne la dérangeait pas avant, donc pourquoi maintenant ? Et chapitre 6 on se mange une révélation comme quoi son chef a comploté contre elle dans le seul but de la mettre dans une situation de stress telle qu'elle serait alors apte à partir en mission à l'autre bout de la galaxie... Euh, what ? Et vous prendrez bien un happy end en prison où son mari vient la voir régulièrement avec leur fils en étant visiblement tout à fait ok avec sa tromperie passée ? À moins qu'elle ne lui ait pas dit et vive toujours dans le mensonge, mais qu'on s'en fiche car c'était important de montrer une fin positive ?
Bref, vous aurez compris que l'histoire n'a pas cessé de me consterner. C'est dommage car j'adore l'idée de portails cachés dans les souterrains de Londres menant à l'autre bout de la galaxie... C'est une idée qui pose mille questions, c'est un mystère fascinant. Mais à côté on a cette écriture défaillante à tant de niveaux, et on a aussi cet étranger aux pouvoirs totalement dingues qui ne seront jamais expliqués (il peut faire disparaître quelqu'un non seulement de la surface de la Terre mais aussi de la mémoire de toute l'humanité, excusez du peu).
Les choix de réponse lors des dialogues ne changent rien de rien. Souvent un perso nous pose une question et on a le choix entre trois réponses du genre : « pas question », « jamais de la vie » et « non ». Non seulement les trois options reviennent au même, mais le protagoniste ne dit même pas exactement ce que l'on a choisi mais une phrase plus longue qui n'a parfois rien à voir dans sa forme avec l'intitulé sélectionné. Dans la peau de John par exemple, j'ai choisi vers la fin une réponse « pour Jack » et suite à cela John a dit une phrase qui n'évoquait même pas Jack ! Perplexité.
Esthétiquement j'ai trouvé le VG assez joli avec une animation à soixante images par seconde plutôt fluide. Les mouvements des personnages par contre sont parfois saccadés, notamment dans les escaliers. Et, choix qui m'a désarçonné à plusieurs reprises, tous les personnages non principaux n'ont pas de visages et pas d'yeux ! Un peu flippant. Je regrette le choix de contrôle du personnage, relatif à la caméra et non à lui-même, dans le contexte d'angles de caméra fixes qui ne cessent de changer d'orientation. Je me suis retrouvé à devoir à chaque nouvel écran arrêter la course de mon perso uniquement pour basculer le stick gauche dans l'autre sens – je déteste cela et j'en ai longuement parlé dans ma critique de Song of Horror. Par ailleurs, la traduction n'est pas fiable.
Le challenge interactif n'a vraiment que très peu d'intérêt : des choix de réponse inconséquents et des déplacements désagréables à la manette... Une série télé d'animation en images de synthèse (comme Star Wars : Rebels) n'aurait rien perdu au change, bien au contraire. Il y a bien une séquence de fouille d'appartement vers la fin mais elle n'a rien de très excitant – sans compter que la rotation de la caméra est laborieuse tout comme l'ouverture des innombrables tiroirs.
Loin d'être une franche réussite, Last Stop n'a cessé de me consterner avec son écriture ratée à plusieurs niveaux. La façon de déplacer les personnages m'a gonflé. Le public n'a que peu de latitude : les choix de réponse lors des dialogues ne changent strictement rien, que ce soit à court ou moyen terme. On ne peut rien rater, on n'a pas besoin de réfléchir ou d'être bon à quoi que ce soit. Au final, à quoi bon interagir ? À part les vibrations de la manette créant une certaine proximité physique avec le héros, le choix du vidéogiciel pour raconter cette histoire n'apporte rien.
Verdict = dispensable
Note(s)
- ^ Présentation du Playstation Store.
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Extraits d'autres critiques
[...] The effect is one of remaining firmly outside of the characters, and that’s worsened by how fuzzy and poorly summarized most of the dialogue options are. You’re often finding out what one choice means only after making it. (Does choosing “social faux pas” mean to commit some social faux pas yourself or remark that someone else has just done so?) So much of Last Stop, from its showy camera angles to its often-nonexistent UI to its focus on naturalistic actions, seems designed to uphold a standard of cinematic presentation that only restricts the game and calls further attention to the artifice that it’s working to disguise.
In the style of a much more limited, if better-written, Quantic Dream game, you awkwardly contort the analog stick to pour coffee and eat cereal as if such conscious and careful motions remotely capture the way human beings interact with objects. Likewise, the stripped-back interface mostly just removes any signal for when you’re supposed to control the characters, leaving you to simply wait until a shot lingers too long on someone vacantly standing in place.
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