Black Mirror (PS4)

Développé par : KING ART GAMES (Allemagne)

Sorti à l’origine en : novembre 2017 (Europe, version PS4)

Comment j’ai pratiqué : Terminé en 6h52 en mode normal (un seul mode dispo), sur PS5 avec la manette Dual Shock 4. 60 images par secondes.

L’Écosse, en 1926. Après le suicide de son père, David Gordon va dans la demeure de ses ancêtres pour la première fois. De sombres secrets, qui ont fait perdre la raison à plusieurs Gordon avant lui, vont le hanter.

Tourmenté par des cauchemars et des rêves éveillés, David craint de devoir subir le même sort que son père : sombrer dans les affres de la folie vers une mort certaine.

Existe-t-il une malédiction qui poursuit sa famille, tout comme le croyait son père ?
C’est à David qu’incombe la tâche de découvrir la sinistre vérité, passée sous silence pendant des générations sous les profondeurs de la terre. Une offrande est due au château de Black Mirror…

CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES

  • Réinvention moderne de la série d’aventure et d’horreur gothique adulée
  • Interactions avec des apparitions issues de visions pour en savoir plus sur le passé de votre famille
  • Atmosphère mystérieuse reflétant les horreurs de l’esprit, style Poe et Lovecraft
  • Doublage d’excellente qualité[1]

Black Mirror est un VG dit « d’aventure », c’est-à-dire dans lequel le challenge n’est pas constitué par des péripéties physiques mais plutôt intellectuelles ; il s’agit d’un personnage, David, qui cherche à percer le mystère entourant la famille de son père dans un coin perdu d’Écosse qu’il avait quitté très jeune – ça ou bien n’y avait-il carrément jamais mis les pieds, je n’en suis pas sûr.

Car autant dans rentrer dans le vif du sujet ; j’ai trouvé l’histoire de BM très confuse. Pour poursuivre mon exemple, je pense avoir lu à plusieurs reprises que John, le père de David, a envoyé sa famille loin du château quand David était tout petit, mais à côté de ça, quand David a des visions de son père enfant, il dit qu’il n’a jamais mis les pieds dans le château ? Donc j’ai un problème avec la chronologie, je ne sais pas si oui ou non la famille de David a vécu dans le château des Gordon, et, si ce n’était pas le cas, où ont-ils vécu ensemble les premières années de la vie de David.

C’était peu clair, et malheureusement j’ai trouvé que tout le cheminement de l’enquête, les certitudes des personnages à un instant T, les déductions qu’ils formulent avec les infos normalement en leur possession, et même l’arbre généalogique des Gordon, tout était flou pour moi, confus, m’a maintenu dans le doute en permanence. C’était peu agréable. Passé le chapitre 1, qui m’a beaucoup accroché, je ne me suis plus jamais senti en phase avec le héros dans son enquête… Vraiment dommage.

Sans pouvoir affirmer avec certitude qu’il y a des incohérences dans l’écriture, je peux au moins dire que l’écriture manque de pédagogie envers son public. Déjà, avoir un arbre généalogique de la famille Gordon aurait aidé à situer chaque membre. Autant j’ai bien compris où Edward et Lady Margaret se situaient, autant les pièces rapportées comme Eddie, Rory, Cecilia et Andrew j’ai eu beaucoup de mal à me représenter leurs ascendance et descendance.

Et puis je crois que le surnaturel est mal géré. Le chapitre 1 est terre-à-terre, pas de problème, mais à partir du chapitre 2 les phénomènes fantastiques se multiplient et les personnages ont tendance à en tirer des interprétations qui m’ont échappé, et en plus en étant sûrs d’eux ! Par exemple, qu’est-ce qui permet à David non seulement d’être sûr que l’âme d’Edward est toujours là, mais aussi qu’elle représente un danger mortel si elle venait à revenir dans notre monde ? À vrai dire ce n’est même pas clair pour moi ce qui faisait d’Edward le monstre dépeint par David ; alors oui il a poussé son fils du haut d’un escalier et a mutilé sa mère – je crois ? – mais le scénario monte le dernier chapitre comme si le retour d’Edward sonnerait l’apocalypse… Il semblait être un tyran domestique, oui, mais de là à faire sombrer le monde dans les ténèbres… La logique de la crainte de David m’a échappé.

Puis David semble très vite tout comprendre à la magie, au surnaturel, il se met à parler de l’artéfact « Black Mirror » comme s’il l’avait étudié pendant un an alors qu’il n’en a pas plus vu que moi, et que moi je ne comprends pas la moitié des théories qu’il présente à sa partenaire, Docteur Leah Farber… Elle-même un personnage dont l’apparition dans l’histoire est complètement arbitraire, elle se pointe au milieu de la nuit, pile la première nuit que David passe au château, comme par hasard, sans explication ! Pendant un temps David ne lui fait pas confiance, et pour le coup je partage sa prudence, mais finalement non, elle est réellement gentille et son arrivée au château comme par hasard au même moment que David ne sera jamais expliquée… Pour moi l’écriture fleure bon l’amateurisme, le bâclé, le manque de rigueur.

S’ajoute à cela une très mauvaise traduction française, incomplète et bardée d’erreurs. Et des réflexions du héros que l’on peut déclencher dans le désordre : exemple, dans le village en ruines, David dit une phrase impliquant qu’il sait qu’Andrew est le fils d’Edward, alors que l’on n’avait pas encore fait cette découverte (je n’avais pas encore examiné l’élément du décor nous révélant cette information).

L’histoire de BM ne m’a donc pas satisfait, je l’ai trouvée bordélique à souhait, pardon pour l’expression. Pourtant j’adore l’Écosse, les vieux châteaux, les malédictions, le surnaturel, les mystères, les secrets de famille… La mythologie fait d’ailleurs envie puisqu’elle évoque la façon dont la famille Gordon a œuvré pour repousser les légions romaines des centaines d’années en arrière, à l’aide d’incantations, mais elle ne rentre jamais vraiment dans les détails : avec quoi exactement les Gordon ont-ils passé un pacte ? Un démon ? Le Diable ? Une entité cosmique ? On ne sait pas. Là encore, déception.

J’ai bien aimé plusieurs choses ceci dit. D’abord la caméra et plus globalement le mode de représentation qui m’a beaucoup rappelé Ico sur PS2. La position de la caméra est gérée par le VG ; on peut agir dessus via le stick droit, mais seulement pour jeter un œil sur les côtés de l’écran ; on incline le stick droit dans une direction, et le temps de l’inclinaison la caméra va s’orienter dans cette direction, avant de revenir à sa place quand on lâchera le stick. Cela permet d’explorer du regard l’environnement du personnage, exactement comme dans Ico, sans avoir besoin de forcément déplacer le personnage.

On dirige le personnage au stick gauche et j’ai bien aimé le fait qu’il marche ; le VG nous impose un rythme modéré, assez lent, qui colle à l’ambiance de l’histoire. Par ailleurs, je n’ai jamais pesté contre des désorientations au gré d’un changement de caméra (ce dont je parlais dans ma critique de Song of Horror) ; certainement parce que les développeurs n’ont quasiment jamais opté pour un changement brutal d’angle de caméra. Dans chaque environnement l’angle de caméra est unique, ou presque, ce qui fait que les déplacements sont toujours sur le même référentiel. Un très bon point.

Par contre les temps de chargement sont légion, entre chaque pièce on a un écran de chargement qui nous demande de patienter une petite dizaine de secondes (sur PS5 avec le disque dur SSD – cela pourrait être pire sur PS4 avec son disque dur mécanique). Je suis rarement gêné par cela, mais ici c’en est au point où un climax dramatique dans une séquence cinématique va se trouver interrompu par un écran de chargement, simplement parce que le plan suivant se déroule dans une autre pièce de la maison… Il y a là, à mon sens, un choix technique maladroit.

Et puis bon, on sent le faible budget… Les décors sont très convaincants, mais aussi très limités en nombre ; les personnages sont hyper statiques quand ils se parlent en cinématique, au point où ça m’a limite perturbé ; et plus gênant encore, à de nombreux endroits mon personnage s’est trouvé coincé, soit dans le décor, soit après un dialogue, et la manette ne me permettait plus de bouger. Seule solution : recharger une partie sauvegardée précédemment, en espérant très fort pour que ma dernière sauvegarde manuelle ne soit pas trop loin dans le passé… Car le VG fait très peu de sauvegardes automatiques… Vers la fin de l’aventure je faisais des sauvegardes « paranos » uniquement pour pallier un éventuel prochain blocage de mon perso.

Le chapitre 1 m’a beaucoup plu pourtant. L’écriture est encore rigoureuse et puis le challenge interactif est intéressant : une fois David arrivé dans sa chambre, alors qu’il est censé sagement se coucher et ne pas en sortir, il décide « d’explorer le manoir ». Wahou ! La séquence est super car on ne sait pas où aller, le manoir semble encore énorme et ça fait peur, on ne sait pas sur quoi on va tomber dans ce manoir bizarre. Alors on explore et chaque découverte (d’objet, de personnage avec qui parler) est une victoire et contribue à rendre l’expérience passionnante. Il y a aussi une énigme assez longue pour ouvrir le bureau du père de David, qui nécessite que l’on trouve un fil de fer à un tout autre endroit dans le manoir pour l’ouvrir sans effraction (ce qui nous vaut un trophée). Dommage cependant que l’ouvrir avec le fil de fer plutôt qu’avec le couteau (en pétant la serrure) ne change en rien la future remontrance de Lady Margaret qui se trouve magiquement au courant de notre « méfait », même en ayant choisi le crochetage au fil de fer. Une fois le bureau ouvert, il y a plusieurs énigmes à résoudre, pas très dures avec le recul, mais qui demandent quand même un minimum d’observation et de réflexion. Ce sera au final largement l’énigme la plus « résistante » de toute l’histoire, malgré sa relative facilité qui m’a fait me demander ensuite, un peu perplexe, comment diable personne dans le manoir n’avait pu encore accéder au contenu du bureau ?

Les autres chapitres sont moins intéressants à parcourir : les objectifs sont très dirigistes et je n’ai plus eu le sentiment que le VG me confiait grand chose à part le déplacement du perso et l’examen à la chaîne de tous les documents placés sur mon chemin. Même le village en ruines labyrinthique, impressionnant de prime abord, n’a pas du tout nécessité que je fasse des efforts de repérage ; en naviguant au pif j’ai trouvé le repère d’Andrew et après ça les personnages sortent tout seuls du village. Chapitre 5, l’énigme du globe terrestre semblait retors mais je n’ai même pas eu besoin de la résoudre pour ouvrir le passage secret de la cheminée, au final je ne sais même pas à quoi servait ce globe terrestre, ni s’il y avait vraiment une énigme l’exploitant. Les « visions » interactives nécessitant de s’approcher d’un fantôme au bon moment pour ralentir le temps et examiner un détail de son action, m’ont gonflé car, arbitrairement, certaines d’entre elles présentent un danger mortel sans que l’on sache pourquoi (l’occasion de quelques game over bien injustes). Et puis même sans cette dimension mortelle sortie de nulle part, je n’ai pas trouvé d’intérêt à ces séquences, l’idée qu’en s’approchant du fantôme on le ralentisse, je n’ai pas compris. En terme de challenge interactif, on est proche du Walking Dead de TELLTALE, à ceci près qu’on enlève les dialogues à choix multiples et donc la possibilité (ou l’illusion) d’agir sur la destinée du héros… Il ne reste alors pas grand chose à se mettre sous la dent, à part quelques recherches et déplacements assez simples, et deux-trois énigmes bien trop faciles.

Le principe de diriger un personnage qui cherche à résoudre un mystère dans un manoir écossais et se trouve confronté au surnaturel, le tout en 3D, avec une vue à la troisième personne, des caméras à la Ico et un affichage à 60 images par seconde, me séduisait beaucoup. Malheureusement, passé un premier chapitre prometteur, le challenge interactif se révèle trop simple, tandis que l'écriture et la réalisation dérangent par leur amateurisme. Une déception.
Verdict = dispensable

 

Note(s)

  1. ^ Présentation du Playstation Store.

 

Galerie d’images

beau manoir.jpg, janv. 2023
Quel belle salle à manger, quel beau manoir. J’ai apprécié les décors.
blabla.jpg, janv. 2023
Edward est mort, mais d’après ce que David a vu, ce n’est pas sûr qu’il soit encore de ce monde… Quoi que cela veuille dire.
bloqué.jpg, janv. 2023
En déplaçant David naturellement, je suis arrivé à le mettre entre les pieds de ce meuble. Bilan : bloqué pour l’éternité. Nécessité de recharger la dernière sauvegarde. Bravo les devs.
brute force.jpg, janv. 2023
Il faut ici appuyer sur trois symboles dans un certain ordre pour ouvrir le passage secret au fond de la cheminée. Dommage, il est très simple de résoudre l’énigme en essayant toutes les combinaisons possibles (peu nombreuses). À vrai dire je ne sais pas s’il existe un moyen « légal » de trouver la bonne combinaison.
camera 01.jpg, janv. 2023
J’adore ce magnifique hall, mais je voulais vous montrer comment peut-on faire bouger la caméra. Si j’incline mon stick droit vers le haut…
camera 02.jpg, janv. 2023
…hop, je peux regarder vers le haut de l’écran. Et admirer cet espèce de dôme vitré au plafond.
cosy.jpg, janv. 2023
Ambiance très cosy dans la chambre de David. On entend la pluie tomber à l’extérieur mais on est au chaud et au sec à l’intérieur. On peut distinguer quelques silhouettes de sapins par les fenêtres.
dehors.jpg, janv. 2023
Même dehors j’ai beaucoup apprécié les graphismes.
fantome.jpg, janv. 2023
Les fameuses séquences de « vision ». Il faut rester loin des fantômes pour ne pas se faire tuer, mais quand un point brille il faut vite s’en approcher pour cliquer dessus… Sauf que dans le stress, on martèle la touche croix et cela a pour effet de zapper le message qui s’affiche… Très, très mal pensé. Notez au passage la qualité de la traduction française.
persos figés.jpg, janv. 2023
Les attitudes des personnages quand ils parlent en cinématique sont assez peu naturelles. On a ici également un exemple de David partant dans une théorie fumeuse sur les phénomènes surnaturels, qui n’est appuyée par aucun élément concret et vient seulement ajouter à la confusion du récit.
traduction.jpg, janv. 2023
Elle n’a jamais « bien aimé » les abats, c’est vraiment français, ça ? De plus, la suite de la phrase est incorrecte : David veut dire en fait que sa mère rate un repas succulent en l’occurrence.

 

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