Amnesia : The Dark Descent (PC)

Cher journal,

J’ai terminé aujourd’hui un jeu d’horreur sur PC, auquel j’ai joué à la manette Xbox 360 : Amnesia The Dark Descent. Sache que c’est le quatrième jeu que je fais du développeur Frictional Games. J’ai joué à sa production dans l’ordre chronologique de développement. La première chose qui m’a frappé dans Amnesia c’est combien le système de jeu rappelle celui de Penumbra (saga des trois premières œuvres du studio).

Comme dans Penumbra, on ne rencontre jamais aucun personnage non jouable qui ne soit pas un monstre, ce que je m’expliquais dans Penumbra par les faibles moyens du studio (le scénario s’en jouait : au moment de rencontrer une femme scientifique dans Black Plague, un virus nous la faisait percevoir comme un monstre agressif). Ce qui m’a surpris en mal c’est que les moyens de Frictional Games ne semblent pas avoir grossi et que par conséquent les limites de leurs histoires sont d’autant plus visibles, voire criantes. Quand dans Amnesia on rencontre un allié, forcément il a l’apparence d’un monstre, forcément quand il nous parle ses lèvres ne bougent pas (télépathie?) et forcément il est immobile et il n’y a aucun interaction physique possible avec lui (des piques par terre le rendent hors d’atteinte!).

Comme dans Penumbra, on manipule les objets du monde en faisant soit même le mouvement nécessaire au stick ou à la souris.

Comme dans Penumbra, on ne peut pas combattre les monstres.

Comme dans Penumbra, on ne voit pas son propre corps.

Résultat, cher journal, tu comprendras que j’ai eu la désagréable impression de jouer à un jeu bâti par-dessus Penumbra, comme une sorte d’add-on ou d’extension du premier jeu. Cela me dérange car je savais à l’avance ce que le jeu pouvait techniquement me faire jouer et me faire voir, et surtout ses limites. C’est comme assister à un tour de magie tout en voyant les ficelles et la machinerie en coulisse que le magicien aurait oublié de cacher… En peu de mots : cher journal, j’ai eu du mal à y croire.

J’ai été aussi dérangé, ou du moins mon intérêt s’est vu plafonné, par le manque de personnalité du personnage que j’incarnais, Daniel. Vois-tu, Daniel commence le jeu amnésique, c’est sa voix-off se parlant à lui-même qui nous l’indique. Il se dit « je m’appelle Daniel, oui… [tousse, tousse] je suis Daniel mais je ne me rappelle de rien ». Là j’ai dit, BON… Je me trouvais dans une espèce de couloir de vieux château, avec la caméra dans les yeux du personnage. Quand je bougeais mon regard, l’image se floutait, le cadre tanguait… Peu agréable et, tu m’avoueras, un effet bien fauché et bien peu efficace pour représenter je ne sais quelle affection sensorielle du personnage (les développeurs eux-mêmes le savent-ils?).

Donc Daniel, amnésique, n’a aucun enjeu vraiment. Il est dans un château super chelou mais ça n’a pas l’air de le déranger. On le fait avancer jusqu’à la prochaine porte sans savoir pourquoi. Dois-je te rappeler, cher journal, combien la quête de Philippe dans Penumbra était personnelle et bien définie ? Ce dernier partait au Pôle Nord à la recherche de son père longtemps disparu et découvrait un complexe secret sous la glace… Philippe observait et commentait son environnement autant qu’on le lui demandait, sans doublage, textuellement, après un clic droit de souris. Se dessinait un personnage en proie au désespoir mais qui avançait pour retrouver son père et découvrir la vérité sur ce qu’il faisait. Daniel est un pauvre amnésique qu’on fait errer sans but dans un château qui ne le fait même pas réagir ! Car dans Amnesia le clic droit ne sert à rien… Le personnage s’exprimera très très peu dans tout le jeu mais toujours doublé (l’inverse de Penumbra donc).

Note que la situation est plus complexe que cela mais qu’une fois développée je resterai sur la même position : le personnage incarné est vide, n’a pas d’enjeu et ne s’exprime pas.

Cependant tout au long de « l’aventure » on ne cesse de ramasser des lettres dont un grand nombre ont été écrites par Daniel avant son amnésie. Fréquemment, en entrant dans une pièce, l’écran s’illumine et une réminiscence de conversation est jouée dans l’audio, où on entendra par exemple Daniel et Alexandre l’antagoniste converser. Puis l’écran s’illumine à nouveau et l’audio revient au présent. Donc si tu veux, cher journal, les fans d’Amnesia argueront que le jeu raconte l’histoire de ce qu’il s’est passé avant son commencement, via lettres et réminiscences de conversations. Mais ont-ils oublié la règle d’or : show, don’t tell ? Tout à son background rapiécé à coups d’indices, Amnesia en oublie totalement de donner sens et intérêt à l’action au présent.

D’ailleurs la fin est cheapissime. Et même ce background, qui se dévoile à peu près tout entier dans le dernier quart du jeu et rien avant ou trop peu, n’a pas beaucoup d’intérêt. C’est une sombre histoire de type soit-disant menacé par une force maléfique (mais qui ne l’a jamais touché…) et qui va se laisse convaincre, et se prendre au jeu, de torturer et sacrifier horriblement de pauvres hères pour rallonger sa vie, jusqu’à ce qu’il ait une crise de conscience, en veuille à celui qui l’a convaincu de faire ces choses, et ne trouve rien de mieux pour se venger que se faire perdre lui-même la mémoire. Si toi-même journal tu ne trouves pas de cohérence dans ces propos, sache que ton serviteur est logé à la même enseigne.

Je me suis donc traîné durant les trois quarts du jeu, à me coltiner une action laborieuse et déjà vue, avant de terminer plus facilement les deux dernières heures de jeu rythmées par les révélations. Pendant les trois premiers quarts j’ai eu plusieurs fois envie de laisser tomber. Alors j’ai laissé passer du temps et j’ai terminé Amnesia petit à petit.

Verdict = dispensable

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